Santiago de Cuba et Miguel Matamoros

A Santiago ce sont les Estudiantinas qui restent les principaux artisans de la diffusion du Son. Celle de MORENO -un employé de la fabrique de rhum Castillo-, est bien connue mais en 1919 sous l'impulsion de Aurelio MIRO nait "Los CHAMPIONS del SON" qui a compté dans ses rangs Siro RODRÍGUEZ pour les parties vocales. La plus fameuse est sans doute "La ARROLLADORA" organisée en 1926 par Narciso "Guayabito" SÁNCHEZ et dans laquelle joue l'un des frères REPILADO. Tres, guitares, trompette, timbales, güiro, maracas, claves, marimbula constituent avec les voix un ensemble qui entraîne la jeunesse santiaguera et sert de modèle à bien d'autres groupes. " La ARROLLADORA " n'aura jamais l'opportunité de quitter l'Oriente cubain, ni bien sûr d'enregistrer.

Narciso Sánchez entouré des membres de "La Arrolladora" . Photographie extraite de "80 años del Son y Soneros en el Caribe". Editorial Tropykos, Caracas 1992.

L'année suivante deux ensembles vont mettre le feu aux poudres dans la cité.
Curieusement les meilleurs cantantes de la ville, Pablo ARMIÑÁN, Augusto CASTILLO, Juan LIMONTA, Gabriel "El Trova" RUBIO s'unissent au contrebassiste Paquito PORTELA, à Ángel ALMENARES, timbalero, mais capable de jouer de tous les instruments, Delfino PUENTES, tres pour former la "ESTUDIANTINA TÍPICA ORIENTAL".
Le groupe tente de se forger une place à côté de la toute récente "ESTUDIANTINA INVASORA", formée d'authentiques soneros qui se donnent pour objectif de faire que le Son envahisse l'île.

Augusto CASTILLO entraîne Ángel ALMENARES vers une autre estudiantina, qu'ils organisent dans la ville, la "RONDA LÍRICA ORIENTAL".
Dans cette éclosion de groupes apparaissent aussi des sextetos puis des septetos. Dès1923 Roberto NÁPOLES forme son propre sexteto "La TROPICAL".

1923. Sexteto La Tropical.

Il est patronné par la marque de bière du même nom comme l'est aussi le sexteto "La MARTINA". A la même époque dans le quartier du Tivoli Francisco REPILADO aurait eu son sexteto "Los SEIS ASES"...

En 1928 naît le groupe "Los MODERNISTAS" de Paco PORTELA. Le groupe de sept fonctionne comme d'autres formations de ce type, sans trompettiste et avec deux guitaristes Gelasio DELIS et Eugenio PORTUONDO ; Félix VISTELL, tres ; Mariano CARBONELL, seconde voix; José GAPIGUE, bongó ; Manuel "Dos Cabezas", première voix.
Manuel BORGELLÁ, tresero profite du passage à La Havane de la formation dans laquelle il joue pour organiser en 1929 un éphémère regroupement de santiagueros parmi lesquels le bongosero Manuel POVEDA et probablement Paco PORTELA. Il baptise celui-ci "GRUPO TÍPICO SANTIAGUERO" et aurait eu le bonheur d'enregistrer plusieurs disques.
Manuel CASTILLO organise également son groupe, un cuarteto puis un quinteto avec Juan MEDINA, Ñico SAQUITO, Ángel ALMENARES et Emilio CARBONELL.

A Santiago en 1931 apparaît le "SEXTETO SANTIAGUERO" formé par le cantante et guitariste Carlos Manuel DELGADO. Outre Carlos, sont membres de cette formation : Luis VAILLANT et Octavio BETANCOURT, voix, maracas et claves, ainsi que les surnommés "El Hueco", bongó; "Guingüe", tres ; "El Terrible ", contrebasse.
Le groupe devient le "SEPTETO SANTIAGUERO" lorsque la trompette de Amilio RODRÍGUEZ s'y incorpore.

A la fin de la décade se forme également un groupe qui va animer la vie sonera de Santiago jusqu'à nos jours, le "CUARTETO PATRIA", fondé et dirigé par Pancho COBAS la O.

Mais c'est un Trio qui, du point de vue historique et discographique, va devenir à partir de 1925 le porte drapeau du Son Oriental, le "TRIO MATAMOROS" , composé de Miguel MATAMOROS, Rafael CUETO et Siro RODRÍGUEZ qui a délaissé "Los CHAMPIONS del SON" .


1925: Trio Matamoros.

Référence incontestée dans Santiago de Cuba, il devient vite un concurrent direct du "SEPTETO HABANERO" et des autres groupes de La Havane dans la mesure où il acquiert une popularité exceptionnelle et prend place au même moment dans les catalogues des maisons de disques. Le "TRIO MATAMOROS" développe un style tout à fait particulier et enraciné dans la tradition orientale qui lui permet de marquer la différence et de rallier à lui ceux qui déjà à ce moment recherchent une certaine authenticité. Le Trio parcourt l'île, occupe les ondes, enregistre fréquemment à La Havane puis à New York les thèmes qui feront sa popularité, "Olvido", "El Paralítico", "El que siembra su maíz"…

Pour faire face à cette popularité et pour maintenir sa place face aux transformations de la musique cubaine, le "TRIO MATAMOROS" au cours du temps se transforme plus ou moins durablement pour devenir le "CUARTETO MAISÍ ", le "CONJUNTO BACONAO", le "SEPTETO MATAMOROS " ou le "CONJUNTO MATAMOROS".

© Patrick Dalmace

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Le Son à Matanzas et dans le reste de l'île.
 
Le Son. La Havane des années trente.
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